Les mécanismes de défense ont cependant la vie dure. D’accord, le roi n’était pas mort, longue vive au roi, mais s’agissait-il réellement d’un album ou plus d’une mise en scène de son auteur, sans doute à des fins mercantiles ? “Where are we now ?”, en sus de poser une question clin d’oeil, ne révélait au final pas grand chose. Très berlinois tant au plan musical que visuel, il constituait cependant un excellent teaser. Mais à présent, et après un autre single, “The Stars (are out tonight)”, il est possible d’écouter The Next Day en ligne dans l’attente de la sortie physique.

Encore une fois pour cet album, le choix du single est des plus opportuns. Le clip de “The Stars (are out tonight) y voit David Bowie, à moins que ce ne soit John Blaylock des Prédateurs, ou encore Ziggy Stardust, ou bien le Thin White Duke mis en face de ses avatars passés. Et là, le doute n’est plus permis, mais l’était-il réellement : le concept de l’album est Bowie lui-même. Son retour a été savamment planifié, les rumeurs diverses ont alimenté la légende, et il ne restait plus qu’à emporter le prix.

Une réelle surprise ? Pas vraiment, en ces temps de juteux come-back d’anciennes gloires. Une heureuse nouvelle ? Assurément. La plus grande force de David Bowie a été de sentir les tendances, les goûts avec ce temps d’avance qui permet de paraître en précurseur alors que bien d’autres ont déjà creusé le sillon, le tout en digérant les codes et en se les appropriant. C’est sans doute ce talent qui s’était effiloché à la fin des années 1990, quoi que cela soit sujet à discussion. Et c’est indéniablement cette aptitude qui éclate le plus avec ce nouvel album. L’époque est à Bowie, cette icône élégante, mystérieuse, vénérable sans être poussiéreuse. C’est donc tout naturellement que le britannique aux yeux vairons reparaît, avec son sourire malicieux et sa fine silhouette. Ainsi qu’avec des titres qui tiennent la route, ainsi que la comparaison avec ses succès passés.

Indubitablement, il sera question de comparaison au cours de l’écoute. Rien n’est révolutionnaire, mais puisque Bowie lui-même est la matière, cela n’est guère étonnant. Alors autant utiliser au lieu de ‘comparaison’ la notion de ‘référence’. L’heure passée en compagnie de l’artiste renferme la même excitation qui fait s’user les ongles sur l’emballage d’un disque longtemps attendu. Elle peut même renvoyer à ces fractions de seconde qui précèdent un premier baiser.

Et vu que David Bowie est de ceux à qui on pourrait tout pardonner pour un sourire, même d’avoir du souiller son PC avec Itunes, il convient de renvoyer les grincheux à leur grotte humide et forcément poisseuse. ‘Haters gonna hate’ ainsi que le proclame la sagesse 2.0. S’il est possible de reconnaître que The Next Day n’est pas exempt de défaut au regard de certains titres légèrement en retrait, tels que le morceau éponyme ouvrant l’album et qui se révèle plutôt terne, sa qualité est indéniable. Et s’il ne traversera peut-être pas les âges à l’image de ses glorieux prédécesseurs, il laissera à tout le moins une empreinte certaine.

1. The Next Day
2. Dirty Boys
3. The Stars (Are Out Tonight)
4. Love Is Lost
5. Where Are We Now?
6. Valentine’s Day
7. If You Can See Me
8. I’d Rather Be High
9. Boss of Me
10. Dancing out In Space
11. How Does The Grass Grow?
12. (You Will) Set the World On Fire
13. You Feel So Lonely You Could Die
14. Heat

Site : http://www.davidbowie.com/

]]> http://www.lesimmortels.com/blog/chronique-musicale/5511/2013/03/03/david-bowie-the-next-day-2013-columbia-records/feed/ 0 http://www.lesimmortels.com/blog/chronique-musicale/5511/2013/03/03/david-bowie-the-next-day-2013-columbia-records/ http://feedproxy.google.com/~r/immortels/~3/McjdqMsORx4/ http://www.lesimmortels.com/blog/chronique-musicale/5480/2013/03/03/clark-fantasm-planes-2012-warp/#comments Sun, 03 Mar 2013 06:04:31 +0000 JPGP http://www.lesimmortels.com/blog/?p=5480 Retrouver l’anglais Clark sur le label Warp est logique. Il s’agit là d’un lieu de choix pour une musique électro présentée comme la plus pointue. C’est pourtant méconnaître le champ d’un tel domaine. Warp est un label plus intelligent et commercial que profondément innovant et expérimental. Sur ce label l’électro reste « main-street ». Cela n’enlève rien à sa qualité, mais qu’on ne nous fasse pas prendre des vessies pour des lanternes.

Fidèle à ce qu’on connaît de lui, Clark maîtrise parfaitement une électro ambitieuse et pluriculturelle. Néanmoins, son travail se situe dans la grande lignée des adeptes des musiques  envoûtantes et aériennes, Brian Eno en tête. Comme lui, Clark « sample » des mélodies lunaires, dansantes, très calibrées. Il prouve toujours une maîtrise des sciences sonores plânantes capables de déboucher autant sur du Hip-hop que de la pur « ambient ».

Clark sait partir dans tous les sens à la manière d’un surdoué. Il a parfois trop tendance à faire sentir sa virtuosité voire une presque esbroufe. A ce titre, Fantasm Planes est moins réussi que son précédent, Iradelphic, plus minimaliste et sincère. Néanmoins, le compositeur reste une référence de la musique « ambient ». Moins édulcorés et sombres que dans les catalepsies du déjà cité Eno, les sons osent parfois la salissure. Ils prennent à rebrousse poil un certain lissé électro Mêlant rythme massif et mélodie cristalline, Clark sait détruire les lignes trop continues. Chaque pièce peut basculer là où on ne l’attend pas. Et à ce titre l’album reste intéressant même si parfois certaines plages ils peuvent agacer.

Partant le plus souvent d’un segment simple et épuré l’artiste développe des trames mélodiques qui se déploient progressivement dans le délire de synthés psychés. Parfois cela tourne à la confiture sonore voire à un certain naufrage. Néanmoins, il faut se laisser porter entre la calme et le bruitisme, la mélodie et un certain chaos sonore. Les instruments acoustiques concassés s’y battent parfois les uns contre les autres avant que tout retourne au calme à coup de litanies imprévues quasi religieuses. Mais l’angélisme a ses limites. Clark les abrège. On ne s’en plaint pas. Quelques boucles des digressions intempestives reprennent le pas dans ce qui tient d’un bric-à-brac sonore. Bref il y a là toujours autant à boire qu’à manger. A chacun d’y faire son marché, ses exaspérations et ses choux gras en fonction de ses chakras.

Le groupe suisse avait déjà su il y a deux ans adresser un grand coup de laminoir à ceux qui s’étaient risqués à poser leurs oreilles sur leurs compositions. Un malaise insidieux, profond, viscéral montait et poissait tout au long de l’écoute, pour finir par sourdre au sein même de l’auditeur. Ici, le choc est plus frontal, plus extatique, fin du monde oblige. Partant d’un néant sonore, rapidement meublé par un battement lourd et profond, Rorcal parvient à entremêler fugaces instants quasi christiques et magma viscéral de pur désespoir.

Le propre d’un maelström est d’entraîner irrésistiblement celui qui en est prisonnier, le plus souvent pour le conduire vers une issue funeste. Avec Világvége les césures entre les pistes se brouillent, l’écho vocal sapent les dernières forces employées à chercher une aspérité pour s’accrocher. S’ensuit alors la chute, l’action des courants broyant celui ou celle qui est devenu leur jouet, simple fétu déjà perdu.

Les membres de Rorcal ne sauraient être tenus responsables de ce destin tragique. Ils ne semblent être que les simples vecteurs de quelque chose qui les dépasse, pareil à de simples cultistes ayant invoqué ce qui dort à R’lyeh. Une telle fluidité implacable ne saurait être de ce monde.

1. I
2. D
3. II
4. V
5. IV
6. VII
7. VI
8. VIII

Site : http://rorcal.com/

Bandcamp : http://rorcal.bandcamp.com/album/vilagvege

L’album en téléchargement libre

A la folie débridée du premier album répond une sorte d’assagissement. Les gamins ont grandi et ont laissé en partie de côtés leurs facéties adolescentes. Ils osent franchir un pas intéressant vers l’expérimentation. Le passage dans les studios de New-York (après une longue préparation dans leur studio de Lilvarlake à Los Angeles) a permis aux californiens de prouver une ambition guère décelable dans un premier album sympathique et dégingandé. Il se marquait par des harmonies vocales très west-coast. Elles ont désormais disparu.

Aussi cuisant et pulsionnel que le premier album mais plus construit, Hummingbird mais prouve que les Local Native sont des musiciens soigneux capables d’endiguer et de maîtriser les électrons libres de leur imaginaire poétique et musical. Certes, tout n’est pas forcément abouti. Mais néanmoins l’album demeure une des bonnes surprises de ce début d’année.

Le duo utilise piano, guitare et basse, sans qu’un manque ne se fasse sentir. Un léger souffle s’élève, comme après un long sommeil, et décrit une spirale, en fragilité. Ce tourbillon s’anime par la suite et habite son espace, comme portant un regard plein de mélancolie sur l’état de celui-ci. Cet état d’esprit n’est point trop affecté et colore plus qu’il ne teinte cette narration ineffable et musicale.

L’absence de chant ne se ressent nullement, les riffs, accords et phrases étant suffisamment expressifs par eux-mêmes. Le rock mélodique qui en résulte est léger tout en étant empreint d’une certaine gravité, d’une vision désabusée. Difficile de déterminer si cette dernière concerne la réalité telle qu’elle est ou telle qu’elle pourrait être sous d’autres dimensions ou plans, mais les impressions qui s’en dégagent  pourraient s’appliquer à ces deux cas de figure.

Dans l’attente d’un album entier o d’un concept-album, les douze minutes et trois titres passées en compagnie d’Innerfield glissent et se répètent sans encombre.

1. Hello World
2. No Gravity
3. Slow burning fuse

Bandcamp : http://innerfield.bandcamp.com/

L’éclectisme sera comme d’habitude à l’honneur, avec la venue des barbus de ZZ Top qui nous feront bouger avec leur blues musclé, David Coverdale se dandinera  pour le plus grand bonheur des fans féminines de Whitesnake, les néo métalleux de Korn essaieront de faire oublier leur défection de l’édition 2007, les légendes du death Morbid Angel nous feront encore une fois l’honneur de nous détruire les tympans, et cette phrase doit bien se finir un jour, voilà, ouf.

Bon, je ne vais pas lister l’affiche vous n’allez qu’à aller sur le site officiel pour vous rendre compte qu’un fois de plus, Ben Barbeau & co nous gratifient d’un festival de classe galactique. Ne soyez pas trop longs pour prendre vos places, mon p’tit doigt me dit que ça va être une fois de plus complet avant l’ouverture des portes. Il va sans dire que nous serons présents une année de plus !

See ya folks !

Mais ce n’est là qu’un détail et tout compte fait une histoire de goût. D’autant qu’entre deux giboulées de notes, la voix jaillit encore dans son cristal. Et fidèle à sa pétition de principe, CéphéeLyra continue à métamorphoser la platitude de trop de marais metal. De nouveaux lieux sonores emportent dans des élans d’agression douce et de libération. L’exaltation s’y fait bohème et l’on comprend mal le trop peu de cas accordé à un tel groupe.

Privati Honoris Causa le bien nommé n’écrase jamais par ses immensités célestes. L’ensemble est enivrant sans être étourdissant. Bref, l’album exhibe sans voyeurisme sonore de solides appâts et prouve toujours une expérience musicale ambitieuse. Céphée Lyra mérite une signature dans un label significatif pour ses fondus obscurs du solstice et de la mémoire des temps. Pour, aussi, sa luminescence rare orchestrée dans des rythmes du soir.

Cette jeune autodidacte honnête a apprivoisé sa guitare toute seule afin d’en faire son unique compagne de route. Car oui, loin des sexy froufrouteuses à l’auto-tune facile et des figures de télé-crochet, nous avons affaire à une nature authentique, à la folk mâtinée de britpop qui met ses jeunes pas dans l’inspiration des plus grands, influencée par Neil Young entre autres noms hautement respectables. Charleen écrit, compose des ballades dans un anglais solide (plutôt rare en France) qu’elle interprète avec une voix acidulée et apaisante à la fois, une voix qui fait penser à l’Islandaise Emilíana Torrini, mais dénuée de son aspect crispant. Sans sombrer dans le mou ni dans la sur-complexité cachant mal le fond de ses chansons, elle se pose et propose de partager un bout de chemin avec elle quelque part (”Somewhere”).

Découvrir la musique de Charleen : http://soundcloud.com/music_charleen

Site officiel : http://www.charleenmusic.com
Sur Facebook : http://www.facebook.com/music.charleen
… Et voter pour Charleen : http://votes-ninkatour.ninkasi.fr

Dans un rock metal, sage parfois mais le plus souvent énergique le groupe tente d’adapter la rythmique du français à celle du genre. On sait la gageure que cela comporte. La nature anglophone linguistiquement parlant du rock fait que la sensation provoquée par un transfert francophone reste mitigée même si Louka ne s’en tire pas si mal.

Certes, le groupe illustre des formulations connues et se reporte à des formes admises. Tout demeure souvent en adéquation avec ce qu’on connaît déjà. Mais la matière brute du metal est traitée avec compétence. L’album tend un fil paradoxal entre le titre qui ouvre l’album dans un appel d’air et celui qui le clôt là où un certain feu entretenu par des rafales d’une lead guitare des plus efficaces.

C’est pourquoi Des singes en Automne s’écoute sans peine. Les titres sont bien construits dans des variations que l’on espérait simplement plus intempestives et rebelles. La technique des Louka - permettant de dégraisser certaines étreintes rythmiques lourdes ou de les exalter avec une énergie renouvelée – il suffirait de peu pour que le groupe précipite .plus dans l’inconnu que dans la ressemblance.