Golden Boots - Winter Of Our Discotheque (2009 - Havalina Records)
janvier 19, 2009 · Print This Article
DESERTS ET CITES.
Tucson, Arizona peut faire penser à une musique un peu primaire, gros rock auquel on ajoute des mélopées hispano-indiennes (ça existe). Tuscon, c’est aussi Calexico et Giant Sand. Mais c’est désormais Golden Boots. Le groupe se situe dans l’exacte mouvance qui recouvre toute la musique made in USA de Los Angeles à New-York, à savoir un retour vers tout ce qui s’est fait depuis Presley, Gene Vincent, Buddy Holly. Chez les Golden Boots (on pourrait aussi les nommer “Golden Roots”) - il y a du Neil Young, du Dylan, mais aussi du Beck, des Monkeys, des Kinks et bien sûr des Beatles (dans leur période investigation).
Tout cela pourrait sembler, et pour reprendre le titre d’un album célèbre de l’histoire du Rock, du “Déjà vu”. Pourtant - sans doute par la grâce d’une production impeccable - Winter Of Our Discotheque sonne parfaitement bien. Mais il y a plus : l’ensemble est intelligent - et contrairement à ce qu’on pense, en musique aussi l’intelligence n’est pas une tare. C’est même un plus à condition tout de même qu’elle n’entraîne pas par excès une peur, un assèchement.
Les Golden Boots ne sont ni violents ni fanatiques mais engagés à fond dans leur musique. Ils la créent et la jouent avec intransigeance, ironie et lucidité. Ils font éclater les couleurs d’un arc en ciel au dessus de l’Arizona (lors des rares orages qui parcourent ses déserts) afin que dans le chaos du monde le soleil revenu déplace les lignes d’horizon. Sorte de “ Crystal Blinkers ”, le groupe ne possède aucune vanité musicale comme s’il y avait dans la musique une frontière à ne pas forcer, au-delà de laquelle on ne devait pas le chercher. Ce qui compte c’est de travailler intra-muros pour perfectionner ce qui existe afin que des fantômes viennent à leur rencontre. Pour le groupe, ceux-là lui appartiennent et il crée avec eux sa propre poésie.
Musiciens du désert où l’on pend le diable par les cornes et où l’on tient comptoir de tous les désirs et de tous les ratages, mais musiciens aussi de la ville où l’on s’amuse, où l’on pleure à froides ou chaudes larmes sans trop savoir ce qui se passe, les Golden Boots anticipent dans la dérive du temps en remontant le courant de l’histoire du rock. Ils restent dans sa tornade. L’urbain comme le désert osent alors se montrer tel qu’ils sont : ventriloques pitoyables qui tentent d’éponger la petitesse humaine. L’écriture du groupe est à ce titre une écriture de l’âpreté du souffle, mais un souffle raclé qui n’hésite pas à dénoncer ceux qui n’osent pas décliner l’espace et le temps de leur rêve et de leur être en se perdant dans des futilités et des bricolages divers.
Jean-Paul
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