Bill Wells & Maher Shalal Hash Baz - Gok (2009 - Geographic)
mars 27, 2009 · Print This Article
Bill Wells est un jazzman alternatif écossais. Il enregistre pour les labels Geographic, Domino et Leaf avec les formations pop The Pastels, Arab Strap ou Belle & Sebastian, ou encore comme aujourd’hui avec Maher Shalal Hash Baz. Après un génial Pick up Sticks (label Leaf) très minimaliste, l’artiste fait une incursion avec Gok dans un univers japonais aussi baroque que très Ryoan-Ji. Le titre de l’album est tiré du nom du studio japonais très réputé Gok Sound où le bassiste et pianiste Bill Wells s’est offert le luxe d’une rencontre avec Tori Kudo, créateur du groupe Maher Shalal Hash Baz avec son épouse Reiko et son équipe de « choristes ». Le label Geographic permet de découvrir aujourd’hui cet album paru en 2006 mais passé inaperçu sous le titre Osaka Bridge (label Karaoke Kalk). On espère aujourd’hui l’accueil qu’il mérite à ce travail d’exception.
Wells a trouvé dans la formation japonaise de quoi le satisfaire et le nourrir pleinement. L’orchestre du Soleil Levant est étonnant jusque dans les méandres de ses approximations qui sont devenues la marque même de sa musique héritière de l’art naïf nippon. Il crée des mélodies épurées et troubles, presque liquides sur lesquelles Wells a pu facilement rebondir. Cet album ressemble à un work in progress pas si loin de l’esprit d’un Robert Wyatt tant il saisit l’auditeur, même lorsque les airs semblent à une première écoute un rien désuets. Ces quinze prises sont quinze morceaux aussi poignants qu’incisifs, que lâchés et désinvoltes. La scène musicale est soudain secouée les coups de boutoirs d’une fanfare venue de nulle part.
Rares sont les œuvres aussi saisissantes mais trop courtes. C’est le seul reproche qu’on peut leur accorder tant elles nous laissent sur notre faim. Peu importe : elles créent un ensemble aussi statique que flexible et réalisent une sorte d’équilibre supérieur et une dynamique particulière. Wells une fois de plus va à contre courant et demeure inclassable. L’ensemble mélange surrections et supinations pour nous plonger dans un archipel musical inconnu dont chaque morceau forme une île. En ôter une donne l’impression que tout s’écroulerait : n’est-ce pas là le plus grand éloge que l’on peut accorder à un album ?
A travers cet apparent éclectisme baroque l’Ecossais offre une sacrée leçon de purisme. Chaque morceau devient une sorte de bloc suspendu au dessus du vide et du silence. Dans un bruissement sonore complexe il développe une infinité de lignes de fuites. En conséquence une telle œuvre revient à s’interroger sur ce que Cage avait assigné à la musique « interroger le lien de l’absence de liens ». Le voyage au Japon de Wells élimine un peu plus ces derniers en proposant des rhizomes où poussent d’étranges champignons. Il est vrai que dans les dictionnaires anglais « Music » ne fraie pas très loin de « Mushrooms » … Seul bémol (mais les artistes présents ici n’y peuvent rien) : il nous manque encore parfois les oreilles suffisamment alertes pour entendre la musique expérimentale mais saisissante que font les spores de Gok lorsqu’elles s’élancent hors de leurs basides pour emplir la microphonie.
Pour découvrir cet ovni, n’hésitez pas à télécharger gratuitement et légalement le morceau “Tipsy Cat” sur le site de Domino Records.
Tracklist :
- 1. Rye and Guy
2. Tipsy Cat
3. The Dust of Months
4. Duck
5. On The Beach Boys Bus
6. Oddults
7. Liquorice Tics
8. Poxy
9. Time Takes Me So Back
10. Family Sighs
11. Stabbed In Hamburg
12. The Williams Sisters
13. Cowtail Calypso
14. Banned Announcement
15. Wiltz / Water Bills Anger Wells Up
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