Les écrits de Daniel Darc
« Energie dramatique de la rue », « A love supreme », « Et vous en feries-vous autant ? », « Retour sur les incidents du passé », Éditions de la Salle de bains, Rouen. Chaque livre 10 €, 10€, 4 €, 12 €.
Daniel Darc fut non seulement un musicien hors pair mais un dandy dans la lignée de Schuhl (mais en plus postmoderne et pop). Comme ce dernier il a écrit de (trop) rares textes autobiographiques présentés de manière luxueuse et pour un prix modique par la maison d’édition rouennaise “Derrière la salle de bains”. Ces fragments de vie sont comme de petits oiseaux qui battent des ailes pour agiter le passé. L’auteur y possède parfois l’œil d’un pèlerin athée qui cherche ses dieux au panthéon du jazz. D’où par exemple cet passage sur la mort de Parker où « tout » Daniel Darc transparaît : « Yardbird crève emportant avec lui l’Amour qu’il savait être l’Unique vérité. « Le sujet semble avoir soixante-cinq an environ ». « Il en avait trente-quatre ! » Toute une théorie de jazzmen piquant du nez sur leur instrument, le bras plié à la Lester Young, mais pas parce qu’ils cherchent le son, juste parce qu’ils ne peuvent pas le plier plus. Les cravates froissées, toutes au même endroit. Ne sommes-nous pas tous des Dandies ? Serrées, autour du cou ou du bras : so what ? Charles Christopher Parker a quitté son corps le 12 mars 1955 à New York, éclatant de rire en regardant la télé ». Le poète – pris parfois à sa grande époque (« Taxi Girl ») pour un « demeuré » (sic…) – accrocha sa vie et ses mots aux étoiles mais en semant son désespoir son dos cambré par les rêves et sans jamais voir l’aube. Sa musique et ses textes étaient là pour calmer ses douleurs « animales « dont il ne laissait rien paraître même si le vide était sur sa tête. Dans ses livres, les ombres passent sans bruit comme des nefs des fous sur une eau rose. Tirés de l’oubli les mots jamais molletonnés font réfléchir sur ce qui ne peut plus se lever. Paradoxalement brillants – mais sans rien laisser paraître – de tels textes dégagent de la crasse et de la graisse du divertissement. Daniel Darc y regardait déjà, en souriant, la mort en face.
[Et pour l’hommage musical, c’est par ici.]
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