Il est toujours étrange de se dire qu’on porte l’oreille sur un nouvel objet alors que le matériau d’origine est ancien, encore plus que ne laisse augurer la date d’enregistrement. C’est un peu toujours ce qui peut être ressenti à l’écoute du blues en provenance du sud profond, comme par exemple avec la voix frelatée à l’alcool de maïs de Charlie Patton. Mais ce qui marche avec les bluesmen fonctionne également pour les blueswomen.
Cora Fluker, accompagnée par Ola Mae Bell, délivre des morceaux et également des monceaux d’âmes, tous tournés vers le Seigneur. La technique vocale qualifiée de « moaning », de complainte, évoque à des fragments de vie difficiles, rudes, qui se trouvent magnifiés et transcendés par une forme de grâce, peut-être d’inspiration divine. Tout n’est pas chant, le verbe haut remplaçant par moments les gémissements profonds de la dame.
Bien entendu, ce genre de compilation mettant à l’honneur une personne dont on sait si peu de choses n’est pas réellement d’actualité, dans la mesure où les morceaux sont intemporels. Toujours est-il que ce contraste entre la fange dont est issue Cora Fluker et son lot de coups et peines et la lumière éblouissante qui jaillit lorsqu’il est question d’un Rédempteur permet de relativiser sans peine les soucis du quotidien pour mieux se ressourcer à l’aune de cette dualité propre aux contemporains de Robert Johnson, vassaux de lumière par l’entremise du Malin.
- Move, Daniel
- Look how the world has made a change
- Shotgun boogie
- Out in the woods
- Dry bones in the valley
- Come on Jesus
- Pray for me
- Talkin’ ’bout jesus
- Yonder comes Jesus
- The World, she’s windin’ up
Quel silence. Pourquoi ne pas prendre la parole?