En tant que leader et compositeur Rodrigo Leao est resté 10 ans avec le groupe portugais majeur Madredeus avant de commencer (à la fin du siècle dernier) une carrière solo. Passant du rock basique aux B.O. de films l’artiste a développé » une musique pop en langue anglaise. Songs peut ressembler à une sorte de « best of » de ses trois derniers albums. Mais il demeure très particulier. Les titres ont « été » réinterprétés par une série d’invités : Beth Gibbons de Portishead, Neil Hannon de The Divine Comedy, Stuart A. Staples de Tindersticks, Joan Wasser et Scott Matthew.
L’ensemble est d’une cohérence parfaite. Moins qu’une logique de best of se ressent à l’écoute une parfaite continuité. L’album représente d’ailleurs le premier temps d’une trilogie. Le portugais développera dans les deux suivants une série de titres dans sa langue natale puis des expérimentations en espagnol.
Dans la musique très architecturée de manière plus classique que rock et hachurée surgissent à la fois un équilibre et un déséquilibre habilement servis par les invités. Leurs voix éclaircissent ou assombrissent la coloration d’origine. Elles fouettent les titres et l’air de la chambre d’écho des mots et de leurs harmonies de départ. Les Songs sortent ainsi multipliés, creusés et ouverts. Ouverts et poussés plus loin qu’eux-mêmes.
Rodrigo Leao invente un théâtre sonore inédit par la traversée de ses compositions. Elles dessinent une inquiétude rythmique dans ce renouvellement proposé. Il y a là une respiration particulière. Chaque chanteur devient le géniteur de la chanson qui est la génitrice de son interprétation. L’album est donc l’inverse d’un tombeau. Il est vivant par de tels passages à l’acte.
Quel silence. Pourquoi ne pas prendre la parole?