Cold Specks – I predict a graceful explosion (2012/Naïve)
Dans la banlieue pauvre de Toronto où vivait sa famille et ses six frères et soeurs , celle dont le pseudo est Al Spx n’avait qu’un endroit pour s’isoler et rêver son futur : le placard de sa chambre où elle s’enfermait. Elle se voyait déjà devenir guitariste d’un groupe de rock en écoutant les Strokes, Tom Waits et surtout le live de Sam Cooke au Harlem Square Club. Très vite elle ose, se lance, perce. Très vite aussi certains de ses premiers titres furent censurés sur les radios qui n’aiment trop souvent que les produits euphorisants et anabolisants.
Sa voix est un instrument supplémentaire au milieu de ceux qui l’accompagnent. Existe en elle quelque chose d’incantatoire quoique voilé. Cela crée – avec des orchestrations adéquates – un climat atmosphérique et éthéré raffiné. Il ne passe pas pour autant l’éponge sur les aspérités du réel. Celle qui revendique le swing gospel baigne son onirisme dans une réalité sombre à l’opposé du gospel séraphique qui n’est pour Michaux qu’une « des réjouissances pseudo célestes pour gens simples ». A la fois poétique et noir, loin d’une odieuse mollesse du spirituel caricature de toute élévation, cet album produit en Angleterre crée un décalage avec ses racines du sud des USA. Par la reconfiguration que propose Jim Anderson et dans cette haute couture, la rebelle et décadente artiste a de quoi faire largement oublier Tracy Chapman à laquelle on se plaît ou complaît à la comparer..