Rayon X – Rayon X (2011 / Autoproduit)

Dans la demeure tutélaire du rock, Rayon X dépique des millésimes révolus. Le passé devient ici le prétexte à de fulgurants envols. Et le groupe  prouve combien la langue française n’est pas une tare à qui se mêle de créer un opus plein de fougue. Encore faut-il une qualité des paroles, l’excellence des musiques et de l’interprétation. Il faut aussi une voix pour alimenter et couronner le tout. Carine X qui a accumulé les expériences de chanteuse, d’actrice et de compositrice donne sa sensibilité aux musiques et paroles de Jissie X.  Elle assume donc un rôle majeur dans ce groupe conçu sous X. Elle nous fait les complices de morceaux parfaits dans leur forme et dans leur cohérence d’ensemble ponctué en chacun d’eux  par les soli de Jissie X.

Aux manettes du groupe il est capable tout autant de créer une musique musclée que des paroles habiles où tout est dit sur un mode métaphorique. Mais Jissie X prouve aussi une maîtrise d’interprétation sans faille. Il l’a peaufiné depuis les années 80 en accompagnant divers artistes (dont Luna et Scholl). Son groupe créé en 2010 se présente fait pour la scène. Toutefois, cet album prouve combien Rayon X est capable de produire un ensemble qui n’a rien à envier aux Foo Fighters par exemple.

L’énergie est omniprésente sur les dix titres de l’album. Tous s’écoutent sans la moindre envie d’en shunter un. On retiendra peut-être “Apocalypsland” et “Ici et maintenant” comme morceaux fétiches. Ils ne font pas dans la dentelle mais ne tombent jamais dans un rock bourrin. Le leur reste au burin. L’album fonce dans le brûlant, vit de ses propres secousses à travers ses nappes de guitares au paradoxal velouté. Chaque morceau est un nouveau départ, une avancée. Et si prière ou plainte il y a, elle ne se dilue pas dans un lyrisme plat : elle crache et résonne jusque dans le désert de Samsara qui au final vibre des derniers échos de l’opus.

Face à l’abîme, Rayon X offre une autre manière de perdre pied mais aussi de prendre corps. Les cris de colère prennent  des modulations inattendues. Elles envahissent la tête le temps d’un voyage (à reprendre) au bord d’un monde où les tonalités de bure du rock se pare de velours afin que tout soi plus sensible. Il ne faut pas en effet se confiner dans le registre des notes dramatiques et se vêtir de deuil pour psalmodier un certain pessimisme. C’est pourquoi le rock prend ici une clarté diffuse. Rayon X le mène derrière les brumes. On en sort envoûté comme par une odeur de femme qui refuse tout parfum.