Youri Blow – The Corridor (2010 / Wild House Blues) « Le blog des Immortels

Youri Blow – The Corridor (2010 / Wild House Blues)

Par Alkayl Samedi 10 avril 2010

Si l’outrageusement chevelu Youri Blow ne nous embarque jamais là où tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté (quoique…) le guitariste à la Dobro (parmi d’autres instruments) nous adresse néanmoins une réelle invitation au voyage. Après le Pérou et Moon Rock my Soul (abordé en ces pages), le périple passe notamment par la Mongolie, sur les terres des Tsaatanes.

Ceux qui ont déjà inscrit par le passé leurs pas dans ceux du voyageur retrouveront ici certains éléments qui constituent l’empreinte du sieur Blow : un jeu de guitare maîtrisé et multiple, une voix profonde et puissante ainsi que des compositions qui sont autant de chemins.

Néanmoins, il serait indéniablement réducteur de ne s’attacher qu’aux ressemblances entre les deux albums. La vibration d’ensemble est bel et bien différente, et les émotions, si elles sont parfois transportées par des vecteurs déjà rencontrés, se colorent de nouvelles nuances, enrichissant par là même le spectre chromatique déployé par leur auteur. La palette picturale se trouve également renouvelée. Moon Rock my Soul pouvait être représenté par un mustang, cheval sauvage, racé, puissant mais parfois un peu fou. Et si les plaines de Mongolie, s’étendant à perte de vue, sont le terrain de jeu et de vie de nombreux chevaux sauvages, The Corridor s’incarne davantage dans le yak, animal plus tranquille mais tout aussi empreint de force, de majesté et de gravité.

Selon un flux réciproque, Youri Blow modèle et modifie sa musique au gré de ses voyages tout autant que ces périples le font évoluer. Les changements s’opèrent par touches légères, à l’image des corrections qu’apporte le sculpteur à son œuvre. Comme par le passé, la densité du propos pourra en rebuter certains, qui interprèteront l’exigence de l’artiste envers ses créations comme une forme d’exigence vis-à-vis de l’auditeur. Il n’en est cependant rien, et The Corridor, comme son prédécesseur, peut s’aborder sans pré-requis, avec comme seule boussole le désir d’être emporté vers le lointain.

Au final, Youri Blow, sans surprise, confirme les impressions qu’il avait pu laisser : il est en effet indéniablement question d’un être habité par son art et mu par la seule envie d’élever et de faire partager celui-ci, sans pour autant sombrer dans une quelconque forme de démonstration stérile. L’émotion reste bien au cœur de sa démarche, et il serait bien difficile de ne rien éprouver, que ce soit positif ou négatif, à l’écoute des accords de ses fidèles compagnes à 6 cordes.

La réelle incertitude qui subsiste est celle de la prochaine destination du guitariste. Les paris sont ouverts : ici, on mise sur une visite aux Aïnous.